Médecin de Santé Publique en Afrique, une passion de 30 ans
Interview : Bernard Storme, Médecin de Santé Publique
«La santé publique est le bon sens appliqué à la pratique médicale. [..] Mon métier : analyser, décider, planifier, budgétiser, mettre en oeuvre, superviser, évaluer, ne jamais cesser de surveiller et réagir aussi vite que possible au changement. »
Propos recueillis par Stéphane Gigandet. Interview publiée le 04/11/11 à 15h31.
Bernard Storme est un médecin qui a consacré l'essentiel de sa carrière à la Santé Publique. De 1975 à 2005, il a travaillé dans de nombreux pays (en particulier en Afrique : Zaire, Burundi, Niger, Afrique du Sud, Tchad...) dans des domaines et sur des sujets que je vous laisse découvrir sur son très original CV réalisé sous forme d'arbre (ou mindmapping) !
A travers ses réponses, Bernard nous présente la Santé Publique et ses enjeux et difficultés, son parcours, son métier, et les missions qu'il a effectuée pendant sa productive carrière.
Qu'est-ce qui amène un médecin généraliste en clientèle privée en zone rurale à se lancer dans la santé publique en coopération en Afrique ? Aviez-vous une expérience préalable de ces pays ?
Au départ je voulais faire de la chirurgie. Les circonstances ont fait que j'ai dû interrompre ma formation. Pour ne pas dépendre financièrement de mes parents j'ai fait des remplacements de médecine générale. Cela m'a mené dans les Ardennes où un confrère m'a proposé de reprendre son cabinet.
La médecine générale des années 60 n'avait rien à voir avec celle d'aujourd'hui. On était de garde pratiquement tout le temps et on faisait tout. Le recours au laboratoire était mal accepté (trop loin disaient-ils), tout cas sérieux demandait une hospitalisation et les spécialistes gardaient volontiers la main sur le suivi.
Mon rayon d'action était d'une dizaine de KM autour de ma base, il m'arrivait de faire des tournées sans descendre en dessous de 80 ans. Consultations de routine et renouvellement d'ordonnances constituaient l'essentiel d'un travail peu excitant que je ne me voyais pas continuer des années. Mais que faire ?
Un de mes amis qui allait opérer bénévolement à Madagascar, sachant que je voulais changer d'horizon, me conseilla de prendre contact avec la coopération qui recrutait. Ce n'est pas que je me sentais l'âme d'un missionnaire voué à sauver les petits noirs, le temps des indépendances était déjà loin, mais un chemin s'ouvrait : un peu de piston politique, six mois de Tropicale, indispensable, et un an de Santé Publique pour élargir mon futur champ d'action et me voilà parti pour une aventure qui durera 34 ans.
Quelles sont les missions les plus marquantes que vous avez effectuées ?
Quand je suis parti on ne parlait pas de missions. La coopération nous affectait à un poste. Les pays assistés n'avaient pas encore formé le personnel dont ils avaient besoin. On faisait du remplacement.
Un coup de chance formidable m'amena à Kasongo dans un hôpital que l'Institut de Médecine Tropicale d'Anvers chapeautait techniquement depuis des années. L'IMT venait de créer un département de recherche et d'enseignement en Santé Publique qui installait là son premier « laboratoire ». Pendant plus de plus de quatre années j'ai pu participer à la naissance du concept des Soins de Santé Primaires qui sera adopté en 1978 par l'OMS comme modèle de développement des services de santé. C'est là que j'ai appris mon métier : analyser, décider, planifier, budgétiser, mettre en oeuvre, superviser, évaluer, ne jamais cesser de surveiller et réagir aussi vite que possible au changement. La santé publique est le bon sens appliqué à la pratique médicale, plus une bonne base de management. C'est devenu aussi une passion, ma passion.
Ces SSP, on les retrouve maintenant mis en oeuvre partout dans le monde à des degrés divers de réalisation, en fonction de l'environnement, de la volonté politique, des fonds consentis, de la sécurité, de tous ces facteurs qui comme la corruption ou la bonne volonté poussent ou freinent la roue du char, et dont nous ne sommes pas maîtres.
Le reste du parcours ne sera que mise en place de pièces de cet puzzle encore inachevé: réorganisation de la lutte contre la malaria, la bilharziose et le choléra au Burundi, étude de faisabilité des SSP au Niger, création d'un système national d'information sur les réalisations des services de santé au Zaïre, lutte contre la tuberculose/sida en Afrique du Sud et enfin quelques postes de conseiller dans des ministères qui au fil des années n'acceptaient plus les conseillers que pour bénéficier de l'argent qui venait derrière.
Ce ne fut pas un long fleuve tranquille, plutôt un long rafting plein de pièges inattendus. Il nous a frotté aux coups d'état et convulsions politiques, aux égos surdimensionnés de fonctionnaires minables, locaux ou internationaux, à des expulsions, à des problèmes familiaux, à la tutelle d'institutions nationales et internationales dictatoriales, procédurières et pourtant brouillonnes, chacune accrochée à ses principes, peu réalistes qui sont, expérience faite, des « aides » incoordonnables.
A chaque étape a coûté quelque chose. Le prix a payer pour accéder à un monde chaque fois nouveau, voir de magnifiques contrées, croiser le fil de tant d'existences uniques avec parfois des perles rares, trouver quelques amis et accumuler tant de souvenirs, qui j'espère résisteront aux atteintes d'Alzheimer.
Quelles sont les différences majeures entre la santé publique dans les pays pauvres et la santé publique dans les pays riches ? Quels pourcentages comparés du budget national des pays riches/pauvres ?
La Santé Publique dans les pays pauvres vise à la mise en place de services capables de répondre aux besoins de la population. Les problèmes à résoudre sont très différents d'un endroit à l'autre. La structure d'âge de la population ses coutumes, son environnement climatique, ses ressources naturelles, financières et humaines en font des entités chaque fois uniques et créent des conditions qu'il faut étudier pour pouvoir agir au mieux des possibilités pour mettre en place les huit composantes des SSP comme le demande l'OMS.
Les structures étatiques délivrent la plus grande partie des soins. Le privé s'adresse aux rares qui ont les moyens de payer..
Dans nos pays la structure d'âge des populations, l'environnement, les habitudes produisent des problèmes totalement différents Les ressources disponibles permettent un luxe incroyable d'infrastructures, d'équipements, de personnel et de service. Disponibilité, qualité, efficacité sont de règle et les progrès constants. Exigence des clients et gaspillage sont aussi malheureusement trop souvent présents. Le privé délivre les services que les mutuelles assurent.
La santé publique dans nos pays se cantonne dans la régulation et le contrôle.
Les politiques de santé publique sont elles plus axées sur le soin ou la prévention ?
Dans les PVD les services sont plus axés sur le curatif car il répond à un besoin immédiat. La médecine « traditionnelle » existe encore, mais ceux qui la connaissaient vraiment ont perdu leurs élèves quand leur pratique a été mise hors la loi et le plupart sont morts sans avoir pu transmettre leur savoir. Ce qui ne veut pas dire que les tradipraticiens n'ont pas de clients.
Le préventif, dont l'utilité n'est pas facile à faire comprendre est proposé en modules intégrés dans les centres de santé.
Le modèle français de Service des Grandes Endémies tend à disparaître. Ces services « monopoles » menaient chacun séparément les activités de lutte contre « leur » maladie hors des structures de permanentes de soin lors de passages pas toujours réguliers dans le pays. Ce système est quasi abandonné au profit des soins intégrés disponibles en continu dans les centre de santé. Rares sont à l'heure actuelle les services verticaux, le SIDA en est cependant un.
Les politiques de santé tendent à promouvoir le préventif intégré.
La consommation d'alcool est-elle considérée comme un problème de santé publique dans les pays pauvres ?
La consommation d'alcool est un problème partout, à des degrés de gravité divers. Les convictions religieuses contribuent plus ou moins à maintenir la soupape en place, mais dès qu'elle saute... ! Les hommes sont tous pareils.
Quelles sont les différences majeures entre les préoccupations de santé publique de pays aussi différents que le Tchad et le Nigéria ?
Voilà qui demanderait une étude détaillée.
A vue de nez je dirais que les problèmes sont assez semblables : infrastructures insuffisantes, personnel peu nombreux et mal payé, responsables pas formé en santé publique, population jeune, donc sujette surtout aux problèmes infectieux, nutritionnels, parasitaires et aux difficultés entourant la grossesse et l'accouchement. La pathologie de la classe moyenne commence à se rapprocher de celle des pays développés.
Le Sida rampe partout malgré l'énorme mobilisation internationale et se taille une belle part dans des les budgets déjà mis a rude épreuve.
Les deux ont accès aux revenus du pétrole ce qui n'est pas une garantie de progrès pour les habitants des zones rurales.
Le Nigeria fait face à une catastrophe écologique et sanitaire en progression géométrique dans le delta du Niger, causée par la pollution pétrolière.
Le Tchad a ses rebelles, le désert qui avance et ses réfugiés dont la gestion n'est pas un cadeau.
Sur cette période d'une trentaine d'années, quelles réelles avancées de santé publique ont été faites dans les pays où vous avez travaillé ?
D'un point de vue tout à fait général, l'accès aux soins a été amélioré (infrastructures, équipement, mutuelles de santé), les services offerts se sont étoffés (SSP) et des efforts ont été faits pour augmenter la qualité des soins (formation et supervision).
Il y a eu quelques grandes étapes :
- dans les années 70, naissance et expansion des soins de santé primaires, les district de santé et le centre de santé sont créés, tout habitant est sous la responsabilité d'une entité de soins.
- dans les années 80, fin de la gratuité des soins, on paie les médicaments, ce qui introduit la gestion financière responsable dans les services dont le coût n'est plus supporté par le seul état. L'informatique commence à se développer.
- dans les années 90 démarrent les mutuelles de santé. Les soins coûtent de plus en plus cher car le personnel demande à être mieux payé et les frais de fonctionnement des établissements plus grands et plus équipés augmentent. Les gens ont du mal à payer leurs frais de santé.
On introduit aussi la notion de primes liées à l'atteinte des objectifs, cela responsabilise le personnel et augmente la qualité des soins.
Internet facilite la communication d'une manière qu'on ne pouvait imaginer 20 ans avant.
- depuis le début de ce siècle de gros efforts sont faits pour que les états développent une planification sectorielle et conduisent eux-mêmes leur développement. Il faudra pour y arriver que chaque ministère se dote d'un très bon économiste....
Quelles sont les régressions notoires ?
Il faut bien constater, hélas, que dans certains pays la guerre, l'insécurité, la politique politicienne et la corruption ont anéanti les efforts et détruit les avancées réalisées au cours des années 70 et 80, réduisant à néant une somme énorme d'efforts, de dévouement et d'argent. Dans d'autres ces fléaux ont tout bloqué.
Beaucoup de pays en développement ont de grandes difficultés à alimenter leur budget santé, les problèmes auxquels ils ont à faire face leur font placer ailleurs leurs priorités. Les aides internationales ne manquent pas, mais elles ont leurs propres objectifs qui ne font pas toujours bon ménage avec les attentes des pays. Elles ont aussi leurs limites. La corruption les a amené à établir des procédures strictes qui rendent la gestion de l'aide parfois très lourde administrativement et difficilement acceptable politiquement.
Lorsqu'un médecin fait une erreur de diagnostic, ou qu'un chirurgien rate une opération, c'est la vie d'une personne qui est en jeu. Pour un médecin de santé publique, c'est la vie de populations entières qui est affecté par ses décisions et actions. Comment arrive-t-on à porter cette responsabilité ?
Les aviateurs disent que les médecins enterrent leurs erreurs mais que les pilotes, eux, sont enterrés avec leurs erreurs. C'est vrai que le médecin de santé publique ne soigne pas directement, il s'occupe de projets, soigne des ministères, pas des patients. Les erreurs sont dans leur domaine moins discernables. En fait leur responsabilité ne s'exerce pas de façon « privée ». Leur responsabilité réside dans une bonne analyse, dans une évaluation précise des coûts, des risques et des avantages des solutions possibles pour informer ceux qui décident des conséquences des différentes solutions proposées pour qu'ils puissent choisir en connaissance de cause. L'expert participe à la décision, mais celle-ci ne leur appartient quasi jamais en propre.
Après toutes les difficultés que vous avez traversées avez vous encore la force d'y croire ?
La situation a radicalement changé.
Après le temps du remplacement est venu le temps des projets. Un peu du clé sur porte : on fait entre experts un système national d'information, on le teste et on donne le rapport final au Ministre : à lui de le mettre en route. Si il a ce qu'il faut pour le faire ! De nombreux projets sont restés dans les tiroirs.
Ensuite on a fait des programmes. C'est à peu de choses près la même chose, sauf qu'on fait le projet en travaillant avec l'équipe qui sera chargée de continuer le travail. A la fin on se retire sur la pointe des pieds. L'outil est en place mais le ministre se trouve devant un budget de fonctionnement à alimenter. Mission quasi impossible au niveau national et toujours refusé par le Institutions internationales. On a fait un bolide qui n'a pas de carburant...
Maintenant on est passé à la cogestion. Les pays ont formés leurs spécialistes et ne voient pas pourquoi ne pas leur donner la direction du projet. Normal me direz-vous. Si on a un bon partenaire, ça va, mais dans le cas contraire, aie aie aie...car si l'expert doit fournir des références en béton, le donateur est obligé d'accepter le personnel national qu'on lui impose. Pas le choix !
Alors comme on n'a pas le pouvoir de changer les choses, on piétine , on piaffe et souvent on a des ennuis, ce qui pour un expert est un péché mortel.
Il n'a d'autre solution que de se mettre en chômage technique, en hibernation mentale, et devenir complice du foutoir pour rester ainsi politiquement correct.
Longtemps j'ai pu « y croire », et j'ai été très heureux d'aller au travail. Maintenant je suis content de ne plus devoir y participer pour gagner ma vie.
Avez-vous la foi ?
La foi ? En quoi ?,
Je suis sûr que Dieu existe, lui seul a pu créer d'aussi belles choses. Peu importe son nom.
Ce que les hommes font de la religion, c'est un autre affaire.
Comment prendre sa retraite quand on a travaillé pendant 30 ans pour aider les autres ?
Ma compagne m'a un jour dit : « Si tu continues, on ne rentrera que pour aller à l'hôpital puis au cimetière sans avoir profité de notre retraite »
Comme là où on se trouvait je ne voyais aucun espoir de réaliser le moindre progrès, elle n'a guère eu de mal à me convaincre.
Où habitez-vous aujourd'hui ? Lorsqu'on a passé tout ce temps "ailleurs", peut-on retrouver un "chez soi" quelque part ?
On a fait un tableau des pays qu'on avait le plus appréciés et de ce qui était important à nos yeux pour vivre bien : sécurité, accès aux soins, climat, facilité de communication, vie sociale, contraintes administratives gérables....
Il y avait l'Afrique du Sud, le Burundi, les Philippines, la Côte d'Ivoire, les Etats Unis....
Et on a choisi de rentrer chez nous en Ardennes où on vit tranquille dans un petit village pas loin d'une ville. On y a fait tout doucement notre trou, on y est bien. Quand le soleil nous manque on part le retrouver un petit moment.
Ma compagne avait raison: j'ai eu peu de temps après quelques problèmes de santé aisément résolus, mais qui ailleurs que chez nous m'auraient tué sans avertissement.
A partir de quand est-ce que l'informatique a pris de l'importance dans votre vie professionnelle/privée ? à quelles occasions ? pour quels principaux usages ?
En 1980, au Burundi un ami s'était acheté un des premiers PC. Il était passionné et m'en avait vanté les possibilités.
Au même moment nous commencions la planification d'une enquête malaria qui devait porter sur 5% de la population de la Plaine de la Rusizi, soit 6000 personnes, et comporter des dizaines d'informations sur chacune. J'ai réalisé qu'on ne s'en sortirait pas avec une gomme et un crayon ni même avec une machine à trier et j'ai commandé le matériel.
Un an plus tard au Niger on était à peine arrivé qu'un projet américain lançait l'informatisation du Minisanté. Il nous a fourni en logiciels, on a appris à s'en servir et cela ne s'est plus arrêté.
A Kinshasa en 89 j'ai eu mon premier portable, ce qui me permettait de travailler chez moi. Le système national d'information sanitaire que nous mettions au point utilisait largement l'informatique pour la compilation des données.
En Afrique du Sud, assez curieusement, j'étais en 1991 au ministère de la santé du Central Transvaal le seul a avoir mon ordinateur. J'avais mis au point une base de données pour le suivi de mes tuberculeux. Ma directrice elle écrivait encore tous ses brouillons et sa secrétaire tapait tout à la machine.
En Côte d'Ivoire en 1999 le communication par internet nous à fait gagner un temps énorme pour la communication de documents entre l'Afrique, l'Europe et l'Amérique. Avant il fallait passer par DHL beaucoup plus lent et très coûteux.
Maintenant on ne s'en passe plus. Certains de nos enfants vivent à l'étranger, avec le mail et Skype on communique vite et souvent, sans restriction.
Ma compagne qui avait vu la machine de notre ami du Burundi occuper tous les soirs un temps qu'il consacrait avant à sa femme avait de suite flairé le danger de rester « en dehors » et s'y était mise aussi. Elle en est à la publication e-books. On a chacun notre machine, et il n'y a pas de concurrence entre femme et machine....c'est maintenant moi qui ai quelque peu décroché.
Est-il toujours aussi intéressant aujourd'hui qu'il y a 30 ans de partir en coopération ?
Partir en coopération est devenu plus difficile maintenant.
Il y a coopération et coopération : MSF, Médecins du monde, la Croix Rouge sont des spécialistes de l'urgence et du court terme magnifiquement organisés, ils ont toujours besoin de volontaires. Ce n'est pas un métier. Les missions religieuse c'est pareil.
Pour travailler dans des projets/programme il faut guetter les appels à candidature lancés par des firmes ou des institutions qui cherchent des candidats pour des postes ouverts dans les projets qu'ils ont gagné ou pour lesquels ils postulent.
Dans l'attribution d'un projet à une firme/institution le poids des CV des experts proposés est déterminant, et pèse parfois plus lourd que les solutions techniques proposées. Diplômes, expérience technique et expérience de travail dans des pays semblables au pays demandeur sont passées au crible.
Cela rend l'accès à ces emplois difficile pour les jeunes.
Les PVD ayant produit leurs experts et l' »affirmative action » étant bien présente la sélection est devenue très sévère pour les experts « étrangers ».
Avant on entrait dans la coopération comme dans une administration, avec une perspective de carrière si on le souhaitait. Maintenant les contrats offerts sont des contrats à durée déterminée. Pas de frais de licenciement. Quand le contrat prend fin on est au chômage, on ne sait pas quand on en obtiendra un autre. Pour les jeunes qui n'ont pas leurs arrières assurés, les problèmes de location, d'école etc les poussent souvent après une première expérience à s'orienter vers des voies moins aléatoires.
Pour eux ce n'est pas un métier, c'est une étape dans la vie pour s'ouvrir d'autres perspectives sur le monde.
Quels sont les autres métiers (hors professions de santé) qui peuvent intervenir sur des missions de santé et sont recherchés par la coopération ?
La santé publique couvre un large spectre d'activités : suivant les activités prévues on peut avoir besoin de professions très diverses : comptable, économiste, administrateur, juriste, mécanicien, enseignant, spécialiste en communication, informaticien, frigoriste, électromécanicien, pilote, spécialiste des mutuelles, assureur ... tout un monde de professionnels pour solutionner des problèmes auxquels les médecins ne connaissent rien. J'ai même travaillé avec un gars spécialisé dans la réorganisation d'entreprises.
Quels conseils aux jeunes qui voudraient aujourd'hui se lancer dans la coopération ou un équivalent ? Et aux moins jeunes ?
Qui suis-je pour conseiller ? Pourtant il y aurait à dire à qui voudrait entendre....
Aux jeunes je dirais de ne plus considérer la coopération comme un métier, à moins de s'engager dans l'administration centrale de la coopération de leur pays. Dans certaines d'entre elles on alterne les temps de service au centre et les séjours sur le terrain. Cela me paraît une bonne formule.
L' OMS, l'Union Européenne, la Banque Mondiale et d'autres grandes organisations recrutent aussi. Souvent elles n'offrent que des CDD. La politique y joue un rôle occulte mais puissant. Les luttes internes pour l'avancement sont féroces, le rendement attendu souvent épuisant.
Le métier d'expert rejoint tout doucement celui de mercenaire qui va de patron en patron sans savoir ce que demain lui réserve, plus prosaïquement ce que sera sa pension. Si ils peuvent encore espérer en bénéficier quand pour eux ce sera le moment.
Vous les plus âgés, si vous avez un bon créneau, un CV d'un kilomètre, la conviction d'être utile, une patience à toute épreuve et que votre santé vous le permet, profitez-en tant que vous en avez envie.
Merci beaucoup Bernard !
Merci également à Jo et Marina qui ont suggéré la plupart des questions de cette interview via l'appel aux questions.
Et bien sûr merci à Marie Claire pour la mise en contact !